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Stratégie Nationale de Développement du Secteur Financier (SNDSF) : les précisions du ministre des finances.

Elles sont condensées dans cet entretien de Louis Paul Motaze , accordé aux équipes de la cellule de Communication de son département ministériel.

Monsieur le Ministre, le vendredi 31 mai 2024, vous avez procédé  au lancement des activités de la Stratégie Nationale de Développement du Secteur Financier (SNDSF) du Cameroun. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir pourquoi une stratégie de développement spécifique pour le seul secteur financier ?

    Depuis 2009, le gouvernement s’est doté d’une vision, celle de l’émergence à l’horizon 2035. Pour la déclinaison de cette vision en plus de 10 ans, il s’est doté d’abord du DSCE pour la période 2010-2020 et ensuite de la SND30 pour la période 2021-2030. A côté de cette boussole générale, le gouvernement dispose de stratégies sectorielles visant à adresser les enjeux particuliers à chaque secteur, tel est le cas de la stratégie Nationale de Développement du Secteur Financier qui vise, via le renforcement de la performance du secteur financier, l’accélération de la croissance et par effet induit, l’amélioration du bien-être des populations.

    Quelles sont les causes de la faiblesse de performance du système financier camerounais ?

    Le diagnostic du système économique et financier du Cameroun, réalisé avec l’appui de la Banque Mondiale et de l’Union Européenne, que je tiens à remercier ici au nom du gouvernement, a mis à jour six défis majeurs qu’il convient de circonvenir pour plus d’efficience. Il s’agit : du manque de “profondeur” du secteur financier ; de la faiblesse de l’inclusion financière et de l’accès au financement des micros, petites et moyennes entreprises ; de la faiblesse du financement de long terme ; d’un déficit en matière de réglementation ; de l’inefficience de certaines institutions publiques de financement ; et, d’une innovation financière balbutiante.

    Pour être plus concret, les promoteurs de PME par exemple veulent bénéficier d’un accès plus facile aux crédits. Que propose cette stratégie pour résoudre ce problème ?

    Les micros, petites & moyennes entreprises (MPME) représentent 98 % des entreprises camerounaises. Malgré leur dynamisme et leur remarquable contribution à la création de la richesse nationale, elles font face au défi de l’accès aux financements, et plus particulièrement les financements de long terme. Moins de 20 % des prêts formels sont accordés aux MPME. Le défi du financement des MPME est une préoccupation constante du gouvernement qui a mis en œuvre différentes mesures visant à renforcer l’accès des MPME aux financements formels. Le dernier instrument lancé est la garantie de 200 milliards incluse dans la Loi de finances et qui a abouti à la signature d’une convention entre le gouvernement, 15 banques et 37 établissements de microfinance en août 2023. Ce mécanisme incitatif vise à conforter les banques et établissements de microfinance relativement au financement des micros, petites et moyennes entreprises.

    Dans le cadre de la SNDSF, la facilitation de l’accès au financement des MPME est visée par la création de la Société de Gestion des Fonds de Garantie aux MPME, l’implémentation de la loi sur le crédit hypothécaire dont le but est de permettre aux biens immobiliers de s’échanger librement et sans entraves, mais aussi, la réforme du Crédit Foncier du Cameroun qui permettra d’amplifier les crédits immobiliers et, par conséquent, le financement plus aisé de toutes les chaînes de valeur concernées par le secteur de la construction et des travaux publics.

    Autre problème, les crises multiples que traverse le secteur de la microfinance qui ont fini par entamer sa crédibilité. Comment cette stratégie entend-elle adresser ce problème ?

    Le sous-secteur de la microfinance est essentiel à notre économie pour ce qui est de l’inclusion financière. Après des années fastes, il est malheureusement en repli dans notre pays. C’est ainsi qu’entre 2015 et 2021, les comptes ouverts dans les livrets des EMF ont cru de 11 % alors que sur la même période, les banques les comptes ouverts dans les banques ont augmenté de 210%. Ce repli s’observe également dans leur capacité à collecter l’épargne qui est devenue marginale (moins de 10 %). Si cette situation s’explique en partie par la transformation en banque de certains Etablissements de microfinance, elle s’explique également par des fragilités structurelles. La gestion des risques y est peu performante comme en témoigne leur taux de prêts non performants, plus élevé que celui des banques, la modestie de leurs fonds propres, l’inexistence d’un mécanisme de refinancement, mais aussi des problèmes de gouvernance. La conjoncture sécuritaire dans les régions du Nord-ouest, du sud-ouest et de l’Extrême-nord a également contribué à la fragilisation de certains de ces établissements.  

    Pour faire face à ces enjeux, la SNDSF suggère une réorganisation du sous-secteur afin de le remettre sur le chemin de la profitabilité et de la rentabilité. Ceci suppose une restructuration des EMF déficitaires ou insolvables et la création d’une centrale de trésorerie nationale afin de pallier le problème du refinancement, un renforcement de la gouvernance et de la supervision de ces établissements afin de les rapprocher des normes internationales en vigueur dans le secteur financier.

    Le secteur financier, quel rôle sur la croissance économique ?

    Une amélioration de la croissance sous-tend généralement un mieux-être des populations. Bien plus, elle garantit des recettes additionnelles car l’Etat peut prélever davantage de taxes et impôts qui serviront à fournir les services sociaux dont les populations sont demanderesses. De ce fait, le gouvernement est très attentif aux prévisions de croissance et aux mesures qui sont susceptibles d’avoir un impact sur cette dernière. Après un taux plus bas de 0,5 % en 2020, la croissance camerounaise a redémarré et s’est établie à 4 % en 2023 après 3,6 % en 2021 et 3,8 % en 2022. Pour 2024, nos prévisions la situent à 4,2 %. En suivant la trajectoire actuelle, notre croissance pourrait atteindre environ 5 à 6 % en 2028. La trajectoire de croissance actuelle n’est pas satisfaisante en regard de la vision d’un Cameroun émergent à l’horizon 2035.

    Les simulations réalisées par nos équipes montrent que la mise en œuvre des principaux piliers de la SNDSF peut avoir un impact significatif sur la croissance. Pour mémoire, ces piliers sont :

    – la loi sur le crédit hypothécaire, dont le but est de stimuler le marché de l’immobilier en faisant du bien immobilier un produit économique échangeable sans entraves ;

    – le repositionnement institutionnel du Crédit Foncier du Cameroun pour en faire un fournisseur de liquidités de longue maturité aux établissements de crédit, ce qui aurait pour effet de généraliser le crédit immobilier et de l’amplifier ;

    3°- l’avènement de la Société de Gestion des Fonds de Garantie aux MPME, afin de les soutenir auprès du système bancaire et élargir ainsi le caractère inclusif de la croissance induite par la SNDSF.

    La mise en œuvre de ces trois piliers, permettra d’amplifier la croissance. Les gains attendus dans le scénario le moins favorable se chiffrent à 2,3 points de croissance additionnelle par an, une fois que ces trois piliers seront opérationnels.

    Par conséquent, la mise en œuvre des mesures contenues dans la SNDSF devraient accélérer la croissance économique nationale en lui faisant passer le cap des 7 % nécessaires à l’ambition de l’émergence à l’horizon 2035.

    Cette stratégie ambitionne de développer un environnement plus favorable au capital investissement. Quels en seront les ressorts ?

    Le gouvernement souhaite que les MPME camerounaises disposent d’un large panel d’options relativement à leur financement. Cet impératif est indispensable pour assurer leur croissance car à cette phase elles ont d’importants besoins en financement long. Le capital investissement apparait ici comme étant un mécanisme adapté à ce besoin particulier en ce qu’il permet aux entreprises d’accéder à des financements dont la maturité oscille entre 3 et 10 ans ; mais aussi, d’améliorer leur gouvernance. Tout ceci renforce leur capacité à recevoir davantage de financements bancaires et est susceptible de créer un cercle vertueux qui s’auto entretient. Le diagnostic réalisé en prélude à l’élaboration de la SNDSF a montré que le faible dynamisme du capital investissement, malgré l’existence de certains fonds, est dû à la déficience du cadre réglementaire. Le gouvernement envisage de pallier cette insuffisance en mettant sur pied les incitations réglementaires pour développer le capital investissement au Cameroun.

    Source: cellcom Minfi

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