À l’occasion de la Journée de l’Enfant Africain, célébrée le 16 juin 2025 sous le thème « Planification et budgétisation des Droits de l’enfant : progrès réalisés depuis 2010 », la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun, présidée par le Professeur James Mouangue Kobila, a exprimé de sérieuses préoccupations quant aux obstacles structurels et fonctionnels persistants au Cameroun qui freinent la pleine réalisation des droits de l’enfant.

La 35e édition de cette journée marquait un bilan quindécennal de l’édition de 2010, qui avait pour objectif d’évaluer les avancées des États membres de l’Union africaine dans l’intégration des enjeux liés à l’enfance dans leurs processus de planification et de budgétisation. La CDHC salue à cet égard les efforts manifestes des pouvoirs publics et de leurs partenaires depuis 2010, notamment l’augmentation substantielle du budget alloué aux départements ministériels ayant des responsabilités en matière de droits de l’enfant, observée entre 2010 et 2025.
Malgré ces progrès normatifs et programmatiques, la Commission a souligné la persistance de défis majeurs. L’un des points d’achoppement réside dans la budgétisation au niveau des collectivités territoriales décentralisées (CTD). Bien que le processus de décentralisation ait avancé, de nombreuses CTD manquent encore cruellement de capacités humaines et financières suffisantes, ainsi que des outils nécessaires pour renforcer le respect des droits de l’enfant dans leurs budgets locaux. Un exemple frappant est la difficulté à assurer la délivrance systématique des actes de naissance à tous les enfants nés dans les CTD, portant ainsi atteinte au droit fondamental à l’identité.

La CDHC se dit également profondément préoccupée par les conséquences directes du déficit de planification et de budgétisation, qui se traduit par un accès insuffisant des enfants aux besoins fondamentaux. Santé, éducation, nutrition, logement et protection contre les abus sont autant de domaines où de trop nombreux enfants rencontrent encore de graves difficultés. Cette situation alerte sur l’urgence d’une meilleure prise en compte des droits de l’enfant à chaque étape des politiques publiques.
La situation des enfants dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Est est particulièrement alarmante. Ces régions accueillent un grand nombre de personnes déplacées internes et de réfugiés, notamment du Nigeria et de la Centrafrique. Une majorité d’entre eux sont des enfants vivant dans des conditions précaires, souvent non scolarisés, sans acte de naissance, et exposés à divers abus. L’absence de soutien psychosocial pour les victimes de violence ou de perte familiale exacerbe davantage leur vulnérabilité, soulevant des interrogations sur la mise en œuvre effective des mécanismes de protection.
Un autre facteur qui compromet gravement l’efficacité des politiques publiques en faveur des enfants, selon la Commission, est la corruption. Les détournements de fonds, le favoritisme, la surfacturation et les pratiques illicites entravent l’accès équitable des enfants à une éducation de qualité, à la santé, à la protection sociale et à une alimentation adéquate. Une telle situation souligne la nécessité d’une gouvernance transparente et responsable pour garantir que les ressources allouées atteignent effectivement les bénéficiaires finaux.
La Commission a enfin relevé que sur les 220 recommandations acceptées par l’État camerounais lors de l’adoption du Rapport du passage du Cameroun au 4e cycle de l’Examen périodique universel (EPU) le 26 mars 2024, neuf sont en parfaite consonance avec la thématique de la Journée de l’enfant africain. Ceci met en lumière une reconnaissance des défis et des pistes d’amélioration déjà identifiées au niveau international, et renforce l’appel à une action concrète et des réformes structurelles pour garantir un avenir meilleur aux enfants camerounais.
Oscar Abessolo
GIPHY App Key not set. Please check settings