Yaoundé a accueilli du 17 au 19 novembre 2025 la 96ème session du Conseil Stratégique et Technologique (CST) de l’Association Africaine de l’Eau et de l’Assainissement (AAEA), un conclave qui a rassemblé une centaine d’experts, chercheurs, professionnels et investisseurs venus d’une quinzaine de pays africains, européens et asiatiques. Plaçant la gestion durable des ressources en eau et le renforcement des services d’eau et d’assainissement au cœur de ses réflexions sous le thème “Gestion durable des ressources en eau et renforcement des services d’eau et d’assainissement : quels leviers stratégiques pour des actions fortes en Afrique?”, cette édition, présidée par le Dr Blaise Moussa, Directeur Général de la Camwater et Président en exercice de l’AAEA, a débouché sur un ensemble de recommandations opérationnelles visant à impulser des actions concrètes et pérennes pour l’avenir du secteur sur le continent.

Les travaux, qui avaient été ouverts par le Ministre de l’Eau et de l’Énergie, Gaston Eloundou Essomba, ont ciblé des axes prioritaires tels que l’innovation financière, l’adaptation technologique, le développement des compétences et la structuration de l’écosystème. Les sessions dédiées à l’assainissement ont particulièrement mis l’accent sur la nécessité de développer des mécanismes financiers innovants, capables de mobiliser des ressources substantielles et diversifiées pour soutenir les investissements critiques dans ce domaine. Parallèlement, les experts ont souligné l’importance d’adopter des solutions techniques qui soient fidèles aux réalités et aux contextes spécifiques des différentes régions africaines, loin des modèles importés qui ne répondent pas toujours aux besoins locaux. La structuration de l’ensemble de la chaîne de valeur de l’assainissement (incluant la vidange des fosses septiques, le transport des boues, leur traitement et leur valorisation) a été identifiée comme un levier essentiel pour optimiser l’efficacité opérationnelle et économique du secteur. Le renforcement continu des compétences des acteurs à tous les niveaux a également été placé au premier plan des débats, reconnaissant que l’expertise humaine est un pilier fondamental pour la réussite des stratégies d’eau et d’assainissement.
À l’issue de ces trois jours d’échanges intenses, les participants ont formalisé un corpus de recommandations destinées à guider les décideurs et les opérateurs. Sur le plan de la gouvernance, un appel pressant a été lancé pour accélérer l’opérationnalisation effective de l’Académie Africaine de l’Eau et de l’Assainissement. Cette institution est envisagée comme un creuset essentiel pour la formation, la recherche et le partage d’expertise, contribuant ainsi à la montée en compétence des professionnels du secteur à travers le continent. De plus, il a été recommandé de renforcer significativement l’harmonisation des politiques nationales avec les standards techniques internationaux, tels que les normes ISO. Cette convergence vise à garantir la qualité, la fiabilité et la sécurité des infrastructures et des services, tout en facilitant l’intégration régionale et les échanges commerciaux.

Concernant l’ingénierie et l’innovation, les recommandations privilégient résolument les solutions fondées sur la compréhension fine des besoins locaux. Cela se traduit par la valorisation de stations compactes et de technologies décentralisées, mieux adaptées aux environnements où les réseaux centralisés sont difficiles à déployer ou à entretenir. Une attention toute particulière est portée à la valorisation énergétique et agronomique des boues de vidange. Cette approche transforme un déchet potentiellement polluant en une ressource précieuse pour la production d’énergie verte et la fertilisation des sols, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives économiques et environnementales. La création d’une plateforme africaine dédiée aux échanges sur les innovations du secteur est également préconisée. Cet espace collaboratif permettra aux acteurs de partager leurs expériences, leurs découvertes et leurs bonnes pratiques, stimulant ainsi une dynamique d’innovation continue et adaptée au contexte africain.
Sur le plan du financement, le CST a plaidé pour la mise en place de mécanismes financiers véritablement innovants et durables. Il s’agit notamment de promouvoir les financements hybrides, combinant apports publics et privés, afin de réduire la dépendance aux sources traditionnelles et d’attirer de nouveaux capitaux. La mobilisation accrue du secteur privé, y compris le soutien spécifique aux Petites et Moyennes Entreprises (PME) qui jouent un rôle crucial dans la fourniture de services, est identifiée comme une stratégie clé. Parallèlement, l’adoption de cadres réglementaires clairs et incitatifs est jugée indispensable pour favoriser la professionnalisation des services de vidange. Cette professionnalisation passe par une structuration formelle des opérateurs et une formation rigoureuse des personnels, garantissant ainsi des prestations de qualité et une gestion plus sûre des déchets.

En clôturant les travaux de cette 96ème session, le Président en exercice de l’AAEA, le Dr Blaise Moussa, a manifesté sa satisfaction face à la richesse des échanges et à la pertinence des recommandations formulées. Il a tenu à adresser une invitation pressante à tous les acteurs du secteur (opérateurs économiques, chercheurs, investisseurs, entreprises, partenaires techniques et financiers, ainsi qu’aux professionnels des métiers de l’eau et de l’assainissement )à se joindre massivement au prochain Congrès International et Exposition de l’AAEA. Cet événement majeur est d’ores et déjà programmé du 9 au 13 février 2026, de retour à Yaoundé, offrant ainsi une nouvelle opportunité de consolider les acquis et de projeter l’avenir de l’eau et de l’assainissement en Afrique.
Oscar Abessolo

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